Palais des Congrès du Développement Durable
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L'aménagement (durable) du territoire (Investigations de LeoMaxx)
L'aménagement (durable) du territoire : Les nouveaux enjeux de l’organisation de notre espace de vie
L'aménagement du territoire fait parti de ces expressions que nous avons trop souvent l'habitude de rapporter à des opérations de constructions de lotissements ou à des entretiens de voierie. Fondamentalement la définition de ce terme est plus complexe car elle touche directement à notre cadre de vie et surtout, "notre" environnement. L'erreur est que nous ne savons pas toujours ce qu'est un "territoire". Un territoire c'est un espace de vie, voir de culture, limité par des frontières soient culturelles, soient politiques et qui peuvent être multiples. Ainsi, à titre d'exemple, nous trouvons le territoire des Flandres qui s'étend à la fois sur la France et sur la Belgique, puis dans le même temps nous trouvons le département du Nord-Pas de Calais. Ce sont deux entités territoriales différentes mais qui occupent un même espace. Le cadre de vie est donc la clé essentielle de l'aménagement du territoire. Géographiquement, l'aménagement du territoire c'est l'organisation d'un espace qu'elle soit structurelle ou matérielle. 
Mais quel est le lien avec le développement durable ? Tout simplement parce que l'aménagement du territoire touche directement au bien-être de ses habitants. Par conséquent, les grands principes définis par les trois piliers de l'équilibre entrent en jeu. Pour que cet article soit plus clair aux yeux de nos lecteurs, j'ai décidé de m'appuyer sur le cas français.
La construction contemporaine de l'état français commence dès la fin de la Seconde guerre mondiale. Une bonne partie du pays est victime des dommages collatéraux des affrontements armés. La période des "Trente Glorieuses" qui s'en suit, c'est à dire entre les années 1945-1975, vont être le théâtre de grandes politiques d'aménagements du territoire. Ces mesures visent, dans un premier temps, à réhabiliter le territoire français puis à faire développer ses structures. On veut faire de la France un pays performant sur le plan des équipements et lui donner les moyens de prospérer. Nous sommes à l'apogée de la "société d'abondance", ou "la philosophie du tout au tout pour avoir tout". La consommation d'énergie atteint des sommets grâce à des coûts énergétiques faibles, les routes tailladent le plancher des vaches en grille de sudoku, les villes gonflent comme un soufflé au fromage dans lequel on aurait mis deux fois trop de levure, le taux d'urbanisation explose, les campagnes se dépeuplent au profit des centrales nucléaires et des taux de nitrates dans les nappes phréatiques... Cette époque où les limites n'existent pas est caractérisé par (ou caractérise) une très forte croissance dans une économie pérenne et prospère, où tout semblent être encore à faire. Seulement voilà, les deux crises pétrolières successives des années 1974 puis 1976 vont donner un coup de frein dans cette expansion napoléonienne. La période trouble qui s'en suit va remettre en cause le modèle ultralibéral pour valoriser un modèle plus "réaliste" et progressiste (mais pas nécessairement socialiste attention!) dont les grands principes sont le contrôle de la croissance et l'homogénéisation des niveaux de vie. C'est de ce mouvement que l'aménagement "durable" du territoire va entrer en gestation pour naître au milieu des années 90.
Par aménagement "durable" du territoire, nous entendons toutes les opérations d'aménagements qui répondent aux besoins du présent sans compromettre les nécessités du futur. Ainsi les politiques, de droite comme de gauche mettent en place des mesures pour participer à cette naissance du développement durable en France. Parmi ces quelques lois on trouve entre autres:
La loi sur l'eau de1992est l'une des premières lois françaises inspirées de la Commission Bruntland de 1987. Elle impose une série de décrets visant à protéger les milieux aquatiques, à maintenir un niveau d'eau potable en abondance mais aussi de prendre en compte l'eau comme un matériel de développement (ex : besoins des agriculteurs qui utilisent 90 % des ressources en eau potable tout de même!).
La loi d'orientation sur le développement et l'aménagement du territoire de 1995 (ou Loi Pasqua). Fondamentalement cette loi s'inspire peu des concepts de développement durable mais elle pose les premières pierres d'une politique d'aménagement plus cohérente. Elle amorce la planification de schémas d'aménagements au niveau national et surtout régional, sans oublier une deuxième partie sur des schémas plus spécifiques, notamment par secteurs (économie, social...). Cette loi ne sera jamais appliquée mais elle construit l'ossature d'un aménagement organisé et réaliste.
La loi d'orientation sur le développement et l'aménagement durable du territoire de 1999 (ou Loi Voynet). Cette mise à jour fondamentale de la loi Pasqua quatre ans plus tôt, intègre des nouveaux enjeux liés aux trois piliers de l'équilibre promulgués par le rapport Bruntland. Ainsi elle crée la charte de développement durable que doivent signer les "pays". Les pays ne sont pas des échelons territoires mais des ensembles "identitaires" de communautés de communes (ou de communes) dans un cadre notamment culturel (ex : Pays d'Auge en Normandie). Elle crée une première forme de démocratie participative (consultation des habitants sur des projets d'aménagements, ex : conseils consultatifs de quartiers) et abandonne les schémas sectoriels au profit de schémas de services collectifs, qui prennent mieux en compte ces nouveaux enjeux sociaux.
La Loi de solidarité et de renouvellement urbain de 2000 (Loi SRU ou Loi Guesso). Autre grande mesure très importante en ce qui concerne l'application du développement durable dans l'aménagement du territoire en France. Dans un premier temps, elle impose une révision de la législation urbaine, à commencer par la modification de deux grands documents d’aménagements : Le POS (Plan d’occupation des sols) devient le PLU (Plan Local d’urbanisme), et le SDAU (Schéma directeur d’aménagement urbain) devient le SCOT (Schéma de cohérence territorial).
Le PLU est un document de planification à long terme de l’expansion urbaine d’une commune. Il est régi par toute une série de nouvelles contraintes législatives liées au respect de l’environnement (ex : Loi sur l’eau) et au contrôle de l’étalement urbain.

Le SCOT est lui aussi un document de planification mais à une échelle de plusieurs communes ou de communautés de communes, en orbite autour d’un pôle urbain d’au moins 15 000 habitants. Il s’intéresse à l’organisation spatiale de ce territoire, en proposant une prospective du développement économique, la gestion des transports, l’élaboration de grands projets d’aménagements (ex : rocade autoroutière) ainsi que les questions relatives à l’habitat (en complément du PLU).

La Loi SRU impose également le principe de mixité sociale en exigeant des communes de plus de 3500 habitants (1500 pour les communes franciliennes) un taux de logements sociaux (HLM) d’au moins 20 % sous peine d’amendes. Comme vous le savez, cette mesure est polémique dans de nombreuses communes. Soit certaines unités urbaines à « haut standing » refusent de bâtir trop de logements de ce type, de peur que l’image de leur commune soit ternie (communes touristiques par exemple), soit des communes qui sont dans l’incapacité de répondre à cette mesure du fait d’une réserve foncière insuffisante (ex : zones inondables). Ce décret, déjà assoupli en 2006, devrait être réexaminé dans les prochains mois.
L’aménagement, désormais durable, du territoire est un sujet vaste qui mérite qu’on s’y attarde. Aussi nous reviendrons plus en détails sur ce sujet dans de prochains articles.
Pour en savoir plus :
Roger Brunet, Le développement des territoires, formes, lois, aménagement, Edition de l’Aube, Collection Le Monde en cours, 95p, 2005
LeoMaxx Sautereau